30.12.06



POUR UNE POLITIQUE DE LUTTE VÉRITABLE CONTRE LA DROGUE !
COLLECTIF STALINGRAD CONTRE LE CRACK (PARIS 10°-18°-19°)

Pas de quartier libre à la drogue et aux dealers !
Pas de société sans lutte contre la drogue : résistons !
Pour une politique publique de soins, ayant pour fer de lance un Samu-toxicomanie !
Nous proposons de reprendre en France le combat contre la drogue autour des huit principes suivants :
1. Pas de société sans lutte contre la drogue !
Résistons à l’intoxication croissante du pays, en particulier pour les jeunes ! Honte à l’ancien mot d’ordre de la MILDT : « Pas de société sans drogues ! » qui représente, en vérité, le mot d’ordre des dealers !
2. La lutte contre la drogue doit être l’affaire de tous, et non pas l’exclusivité de l’État. Elle n’est donc pas une simple affaire de politique dite publique.
Organisons-nous pour résister ! Si l’État doit faire son travail propre, la clef de la résistance contre la drogue tient à l’intervention de chacun.
3. Pas de lutte contre la drogue sans une véritable prévention !
Prévenir, c’est avant tout dissuader les jeunes de se droguer en leur montrant qu’il y a beaucoup mieux à faire.
Avant tout, la prévention doit mobiliser tout un chacun.
4. Pour une politique publique de soins en matière de toxicomanie ayant comme avant-poste un Samutoxicomanie !
L’État doit encourager les toxicomanes à sortir de leur servitude volontaire, en se souciant de se soigner médicalement de leur toxicomanie. De véritables soins médicaux, non réductibles à une simple assistance sociale, doivent être dispensés dans des centres rattachés aux structures hospitalières.
5. Pas de lutte contre la drogue sans une police empêchant les dealers de nuire !
Si la lutte contre la demande de drogues est l’affaire de tous, la lutte contre l’offre est l’affaire spécifique de l’État et de la police. Les gens doivent s’assurer que l’État et la police font correctement leur travail en ce domaine.
6. La lutte contre la drogue n’est pas une guerre : elle est affaire de politique émancipatrice.
L’idéologie (américaine) de la « guerre à la drogue » est contre-productive : elle prétend intensifier le combat quand, en vérité, elle le démobilise en le militarisant. L’essentiel, en matière de lutte contre la drogue, est d’incorporer cette lutte à une vision globale émancipatrice.
7. Les mesures de réduction des risques, visant à limiter les dommages collatéraux (infections), ne doivent pas servir à démanteler la lutte contre la drogue. Au titre de la lutte contre la drogue et la toxicomanie, la politique de réduction des risques est un désastre.
Les mesures de réduction des risques touchent à la lutte contre le sida (et les autres maladies infectieuses), non à la lutte contre la drogue : elles ne doivent pas servir de Cheval de Troie pour démanteler la lutte contre la drogue.
À ce titre, la politique de réduction des risques (qui prétend ordonner la politique en matière de drogue à ces mesures, qui organise un chantage au sida pour faire accepter la toxicomanie) est un désastre qu’il faut combattre.
8. Du point de vue de l’émancipation, il convient de se rapporter au toxicomane comme à un nihiliste.
- Pour une politique publique unilatéralement répressive, le toxicomane n’est qu’un délinquant. Or, si le toxicomane est souvent par ailleurs un délinquant (pour se procurer facilement un argent abondant), sa toxicomanie, en tant que telle, n’est pas essentiellement une délinquance.
- Pour la politique de réduction des risques, le toxicomane est essentiellement une victime. Qui ne sait pourtant que si le toxicomane aime, il est vrai, à se présenter comme une victime, c’est qu’il l’est essentiellement… de lui-même !
- Pour une politique publique de soins, le toxicomane est un malade qu’il faut médicalement soigner. Cette position nous paraît, en matière de politique publique, la plus juste et la plus productive même s’il apparaît que la toxicomanie, comme telle, est difficilement concevable comme une maladie (elle semblerait plutôt un mode
particulier de symptomatisation pour différentes maladies psychiques).
- Mais pour les militants de la lutte contre la drogue, le toxicomane sera essentiellement vu comme un « nihiliste » : comme quelqu’un qui veut le néant (qui veut la servitude, l’avilissement, l’auto-destruction…)plutôt que de ne rien vouloir. Il convient alors de lui opposer qu’on n’est pas condamné à ne rien vouloir ou à vouloir le rien, qu’on peut vouloir l’amour, la musique, la poésie, telle science, tel engagement collectif, le sport, etc., et que ce sont là des manières autrement intéressantes d’intensifier son existence.

COLLECTIF STALINGRAD CONTRE LE CRACK (PARIS 10°-18°-19°)
Stalingrad@noos.fr 06 76 58 18 27 www.entretemps.asso.fr/Stalingrad

16.12.06

QUE FAIT VRAIMENT COORDINATION
TOXICOMANIES 18 DANS LES
QUARTIERS DU 18ÈME ?

Cette question, que tout un
chacun se pose légitimement,
le très officiel Observatoire
français des drogues et des
toxicomanies (Ofdt) se l’est
déjà posé il y a peu. Pour y
répondre, il a commandé une
évaluation à trois personnalités
1 qui, après large enquête sur le
terrain, ont rédigé un rapport,
publié en 2004, dont nous
conseillons vivement la lecture :
Médiation et réduction des risques – Évaluation
du programme de réduction des risques et de médiation
sociale dans le 18° arrondissement de Paris. 2 Voici
ce qu’on peut y trouver qui éclaire la nature véritable de
CT18 3.
Pour cela, examinons successivement comment ce rapport
1. évalue les effets réels du travail de CT18 : à quoi servent-
ils réellement ?,
2. rapproche ces effets des moyens effectifs mobilisés
par CT18 : qu’est-ce qu’ils font exactement ?,
3. examine le rapport de ces moyens aux objectifs déclarés
de CT18 : qu’est-ce qu’en vérité ils veulent ?,
4. remonte ensuite à ce qui pour CT18 constitue les
vrais problèmes des quartiers légitimant qu’ils interviennent
: pour CT18, qu’est-ce qui ne va pas dans le
18ème ?
5. et pour finir avance une évaluation globale : Finalement,
cette action de CT18 est-elle une réussite et par
là un modèle exportable ?.
1) Effets du travail de CT18
Sur les habitants ? Les effets s’avèrent… nuls !
Si « la Coordination a toujours répondu aux appels des riverains,
[…] il est certain que ce mode de fonctionnement n’a
pas toujours contenté des habitants las de devoir faire de
multiples réclamations pour vivre dans des conditions décentes
d’hygiène et de tranquillité. ». (66)
« La Coordination n’a probablement pas convaincu - parce
que c’est indéfendable - du bien-fondé de la concentration
des structures sur un périmètre restreint ». (65)
Sur les toxicomanes ? Les effets s’avèrent… quasi-nuls !
« Les responsables des structures [de réduction des risques
dans le 18ème] n’ont pas un point de vue unanime sur la capacité
qu’a eu le dispositif d’améliorer la situation sanitaire
et sociale des usagers. » (43) [Doux euphémisme…]
« EGO et la Coordination ont mis en avant le fait que le comité
d’usagers de EGO avait placardé des affichettes visant
à dissuader d’autres usagers d’acheter ou de consommer
1 une sociologue (S. Fayman), une anthropologue (C. Salomon) et un
médecin (P. Fouilland), au demeurant tous favorables à la réduction
des risques (ce qui rehausse leur sévérité à l’égard de CT18).
2 Le rapport est disponible à www.drogues.gouv.fr
3 Pour plus de précisions, on pourra se reporter aux deux textes suivants
: www.entretemps.asso.fr/drogues/2004.2005/12.mai.htm (École
des Mines de Paris, 12 mai 2005) et
www.entretemps.asso.fr/Stalingrad/Etudes/CT18.htm (Stalingrad, 15
février 2005).
leur produit devant des enfants. L’initiative est louable mais
d’une part le libellé n’est pas très explicite et il n’est pas sûr
qu’il soit compris pour son sens réel ; d’autre part, ceux qui
ont rédigé ou affiché ces exhortations peuvent très bien passer
par des moments où ils perdent de vue les recommandations
qu’ils ont eux-mêmes formulées et tomber dans des
comportements peu éducatifs. » (80)
« La médiation n’a jamais permis un véritable dialogue entre
usagers et riverains. » (88)
Seuls effets décelables : coordonner… les nombreuses
structures bas-seuil du quartier qui s’ignorent !
« La Coordination a eu un rôle de liaison entre les structures
à bas seuil. » (36) « Il s’agissait en effet de mettre en réseau
et coordonner les structures spécialisées. » (38)
2) Moyens mobilisés ? La « médiation »
Le principal moyen d’action est la « médiation », ce motfétiche
: « La médiation est invoquée comme la nouvelle panacée
du lien social » (11) avec des « médiateurs » plutôt
que de vrais éducateurs-rue :
« Les termes de référence du projet nommaient des éducateurs
qui finalement ont été appelés médiateurs ». (32)
Une « médiation » qui a pour principal outil le double
langage : « L’ambiguïté de la mission se révèle dans le discours
tenu par les équipes de rue au cours de leurs tournées,
selon qu’il s’adresse à des riverains ou à des usagers. » (63)
Une « médiation » qui n’est pas neutre car elle privilégie
le point de vue… des toxicomanes ! :
« L’usage du terme de médiation est souvent abusif » (11)
« Il a été difficile à la Coordination de maintenir une neutralité
sur ces questions [de toxicomanie]. » (64)
Soit une « médiation » qui revient à se faire l’avocat des
toxicomanes !:
• auprès de la police : « Dès que les gens de la Coordination
voient un usager contrôlé par les flics, ils y vont. » (75)
• auprès des riverains : « Une certaine priorité a été donnée
aux usagers par rapport aux riverains. » (54)
Une « médiation » qui tente d’étouffer la colère des gens
du quartier contre le trafic : la « médiation » est affichée
« comme un moyen de réduire les tensions entre habitants et
usagers. » (92)
Une « médiation » qui finalement sert d’arbitre… entre
les nombreuses structures bas-seuil !:
« Ce n’est pas vraiment de la médiation mais une action
d’interpellation et de rapprochement de différentes institutions
» (48)
Au total, une « médiation » inadaptée aux tensions générées
par le trafic : « L’objectif de médiation est peu adapté
aux tensions et aux conflits nés de la toxicomanie de rue dans
des quartiers en difficulté de tous ordres. » (94)
Ainsi la « médiation » de CT18 déploie un édredon face à
la colère des gens du quartier (constatant la main mise du
trafic sur les espaces publics et privés) et résout les tensions…
entre structures rivales !
3) Objectifs de CT18
Que veut vraiment CT18 ? D’abord CT18 ne le dit pas
clairement :
« Il serait hasardeux de se prononcer sur des résultats en
raison du peu de précision des objectifs assignés au dispositif
» (61) [Avancer masqué, derrière un brouillard de mots :
comme chacun sait, Pierre Leyrit s’y entend…]
Il s’avère cependant qu’il s’agit pour CT18 de calmer le
quartier en agissant… sur les habitants ! Il s’agit de
- « s’occuper des usagers et calmer les habitants » (42),
- « calmer les esprits dans le quartier » (44).
Il faut pour cela changer le regard des habitants sur la
drogue : le dispositif « se cantonne à une transformation de
la vision que les riverains ont de la présence massive
d’usagers de drogues dans leur environnement. » (27) en sorte
que ces riverains acceptent le trafic et entérinent la présence
du crack dans le 18ème. S’agit-il alors de lutter
contre la toxicomanie ? Nullement !:
« L’option de la réduction des risques est plus proche de la
réalité de l’action du dispositif pilote que de son intitulé :
“dispositif pilote de lutte contre la toxicomanie”. » (27)
La « lutte contre la toxicomanie » déclarée a pour sens
véritable, en alliance avec EGO, une intégration de la
toxicomanie dans le quartier ! :
« Pour EGO, le dispositif permet d’avancer vers cette utopie
politique qu’est l’intégration de la toxicomanie dans le droit
commun. » (45) [Chacun appréciera ce qu’est une « utopie
politique »… pour EGO !]
et de faire croire que les « nuisances sont subies tant par les
usagers de drogues que par les riverains » (19). La logique se
dessine : CT18 dit d’abord que les toxicomanes subissent
autant de nuisances que les habitants et ensuite attribuent
ces nuisances subies par les toxicomanes… aux habitants
! En effet, voici ce qui pour CT18 ne va pas dans le
quartier :
4) Qu’est-ce qui pose vraiment problème à CT18 ?
Le rapport rappelle les postulats que CT18 fait siens :
« Deux postulats. Le premier est que les problèmes de société
ne se résolvent pas par la négation des usagers (les chasser),
mais par une élaboration concertée de solutions ou de compromis.
Le second est qu’il est plus important de réduire les
risques liés à la toxicomanie que de chercher à éradiquer
cette dernière. » (37)
• Le premier problème est donc que les toxicomanes risquent
d’attraper le sida, non pas qu’ils s’intoxiquent.
« Le postulat de base est que les solutions sont à chercher
ensemble et que les usagers de drogues ne sont pas des parias
à chasser. » (61)
Soit le vieux chantage au sida de la politique de réduction
des risques : « acceptez la drogue, sinon c’est le sida ! »
• D’où le second problème qui est que les gens du quartier
ne sont pas prêts à vivre avec le trafic, que les habitants
et des commerçants refusent de vivre avec la drogue
dans leur quartier ! Ainsi, pour CT18, ce qui ne va pas
dans le 18ème, ce n’est pas l’omniprésence du crack mais
les gens qui refusent de vivre avec…
Contre les habitants qui refusent une « concertation »
pour institutionnaliser le crack, CT18 exhibe un maigre
cortège d’associations-croupions où quelques rares militants,
toujours les mêmes, déguisés en naïfs habitants,
déclarent « quartier libre au crack ». L’Ofdt ne se laisse
pas prendre à cette manipulation : « Les associations impliquées
dans le dispositif [de réduction des risques] ne sont certes
pas représentatives de l’ensemble de la population. » (96)
5) Évaluation globale de l’activité de CT18
Au total, pour l’Ofdt, le bilan de CT18 n’est guère satisfaisant
: « Le bilan du dispositif est contrasté. » (87) Derrière
l’euphémisme, l’Ofdt rappelle qu’il s’agit là d’un
« engagement militant » (85), d’une « organisation militante »
(49), non pas d’une institution neutre et professionnellement
compétente, et que ce travail partisan n’est ni gratuit,
ni désintéressé : selon l’Ofdt, son coût en 2001
s’élevait à 343 000 euros…
En conclusion, l’Ofdt se demande : compte tenu de tout
ce qui précède, faut-il étendre ce « dispositif-pilote » à
d’autres arrondissements de Paris ? Le diagnostic des
évaluateurs est ici formel : non ! « Une des attentes face à
l’évaluation est de savoir si ce dispositif est reproductible. Au
risque de décevoir, nous dirons qu’il l’est difficilement. » (99)
Puisque CT18 ne sert à rien d’autre qu’à orchestrer la
politique de réduction des risques dans le 18ème - d’un côté
à étouffer la colère des habitants et commerçants (sans
grands succès, comme on l’a vu…) et d’un autre côté à
coordonner les nombreuses structures bas-seuil qui prolifèrent
dans le 18ème et se disputent la clientèle des crackés
et les fonds publics -, une telle « coordination » n’aurait
aucun sens dans un autre arrondissement où n’existe
(heureusement pas !) un tel entassement de structures rivales.
Corollaire : si les structures bas-seuil en venaient enfin à
être délocalisées, plus besoin de CT18 pour
« coordonner » leurs chamaillades !
LA SITUATION RÉELLE DU 18ÈME
Quelle est, pour l’Ofdt, et par-delà ce qu’en dit CT18, la
véritable situation du quartier ? L’Ofdt a pris soin de vérifier
que, pour les gens du quartier, la toxicomanie est
bien le principal problème :
« Pour 27% des gens [majorité relative], la toxicomanie vient
en tête des problèmes ressentis dans le quartier. Au coeur du
trafic, le pourcentage des gens qui trouvent que la toxicomanie
est le premier problème du quartier passe à 42%. » (71)
« Une moyenne de 87% (92% au coeur du trafic) déclare
avoir déjà rencontré des usagers. » (71) « 5% déclarent
avoir été agressés, presque toujours dans l’espace public. »
(71) 5% : cela veut dire qu’un habitant sur vingt a été agressé
dans la rue par un toxicomane !
Pour l’Ofdt, cette réalité, insupportable pour les habitants
« pauvres et honnêtes » (62) de ces quartiers, ne relève pas
d’un fantasme, d’un simple « ressenti », mais de pratiques
bien réelles :
Il y a bien une « explosion de la consommation de crack »
(56, 88). « L’étalage public du trafic de stupéfiants demeure
une des caractéristiques des quartiers concernés. » (63)
« Les pouvoirs publics et la police tolèrent le trafic afin de le
circonscrire aux quartiers déjà atteints. » (21) « La
concentration, dans le même lieu, de la vente et de la
consommation de stupéfiants traduit la tolérance à l’égard de
pratiques qu’on ne souhaite pas déplacer vers d’autres
l«i eLuax . v»e n(3te9 )d es produits et leur consommation

se pratiquentaussi aux abords des structures, c’est indéniable. »

Voilà la toxicomanie que CT18 voudrait faire accepter au
quartier, par « concertation » et « coordination » !
La raison d’être de CT18 : Pas de 18ème sans crack !
Quand tout le monde voit clairement que le crack pourrit
les quartiers où il s’infiltre, CT18 s’affaire, depuis bientôt
dix ans, et sur fonds publics, à faire prévaloir un « Pas de
18ème sans crack ! » (transposition sur l’arrondissement
de l’ancien mot d’ordre de la Mildt « Pas de société sans
drogues ! »). Comme le rapport de l’Ofdt le montre bien,
les habitants et commerçants du 18ème ne s’y résignent
pas et résistent sans relâche à Coordination Toxicomanies
18. Gageons que leur résistance n’est pas prête de
s’arrêter !
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